André Beucler par voie d’affiche : littérature, cinéma, radio, publicité

Journées organisées par l’axe "Interférences de la littérature, des arts et des medias" (CSLF EA-1586, Université Paris Ouest-Nanterre) / UPOND, l'université de Franche-Comté / ELLIAD EA-4661 et l’ANR LITTéPUB, en collaboration avec l’Association André Beucler (www.andrebeucler.com)

Direction scientifique : Myriam Boucharenc et Bruno Curatolo

Présentation
André Beucler (1998-1985) est aujourd’hui plus connu du grand public pour avoir partagé l’affiche avec Gabin dans le film de Grémillon, adapté de son roman Gueule d’amour, que comme romancier-phare des Années folles. Entré en littérature par la grande porte des éditions Gallimard avec La Ville anonyme (1925), il enchaîne alors nouvelles et romans : Le Pays neuf (1927), La Belle de banlieue (1927), Le Mauvais Sort (1928), À droite par quatre (1930)... Aussitôt salué par la critique comme un "incomparable montreur d’images" (Georges Poupet), il s’attire l’admiration enthousiaste de Paul Morand et de… Charlie Chaplin. L’attrait de ses personnages pour le fortuit, l’errance et parfois la dérive, son sens de l’insolite et du désaxement amoureux en font un écrivain en phase avec la modernité romanesque des années vingt. Pourtant, lorsque paraît à la date peu opportune de septembre 1939 son roman à clé, La Fleur qui chante, Beucler n’est déjà plus le "grand romancier de demain" pressenti dix ans plus tôt par André Rousseaux.

Dès le début des années trente, son nom côtoie celui des stars de l’époque (Pierre Brasseur, Charles Boyer, Brigitte Helm…) sur les affiches des films auxquels il participe en tant que scénariste, dialoguiste ou co-réalisateur tandis que dans les colonnes de Marianne, il se fait un nom comme grand reporter, plus lucide que rêveur, s’agissant de consigner la montée du péril nazi. Chez Gallimard, il lance l’éphémère collection "Les rois du jour", première du genre, destinée à associer la littérature à la glorification des grandes entreprises françaises : il compte ainsi, avec Cendrars et Mac Orlan, parmi les plus fervents promoteurs de la "littérature publicitaire".

Au lendemain de la Seconde Guerre, il se tourne vers la radio aux côtés de Paul Gilson et Albert Rièra, avec lesquels il anime de nombreuses émissions, dont le Bureau de poésie sur Paris-Inter. Son nom a quasiment disparu de l’affiche littéraire, lorsqu’il signe, en 1948, Les Instants de Giraudoux et quatre ans plus tard, Vingt ans avec Léon-Paul Fargue. Cette étrange préférence pour l’écriture à la deuxième personne fera de lui celui qu’il est resté pour l’histoire littéraire : un passeur considérable, un écrivain qui plus qu’à sa postérité a œuvré à celle de ses amis. Bien que renouant sporadiquement avec le roman (29 bis troisième étage en 47, Le Carnet de vengeance en 52, Ténébrus en 68), dans une veine différente de sa première manière, il n’affiche que mépris pour ce que Fernand Divoire nommait la "stratégie littéraire". Ce chantre de l’affiche et du slogan publicitaire dans les années vingt n’a de cesse après-guerre d’en dévoiler l’envers, celui du "bluff" et de "l’hyper-épicerie". Préférant à la gloire en solitaire la notoriété "composite" sous toutes ses formes, André Beucler n’a pas joué le jeu de l’histoire littéraire selon les règles que celle-ci impose à l’homme de lettres. Il appartient aujourd’hui à l’abondante famille des écrivains qui se méritent, vers lesquels on se retourne, non par la force du battage, mais parce qu’ils laissent paraître, mieux que de plus connus, sans doute, les implacables rouages de renommée littéraire.

On s’interrogera sur la manière paradoxale et ambiguë qu’André Beucler a eu de décliner "l’affiche", au propre comme au figuré, dans ses romans, dans la presse ou à la radio, que ce soit sur le ton de l’éloge ou celui du sarcasme, d’en sonder le recto et le verso, d’en occuper le haut comme le bas, de la partager ou de s’y dérober, pour y revenir à l’occasion de ces deux journées d’études, les premières que l’université lui consacre.

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